Le projet NAOS
NAOS (Nasmyth Adaptive Optics System) est le 1er système d’optique adaptative à avoir été installé au Very Large Telescope (VLT) de l’ESO (Paranal - Chili). Il a été réalisé par un consortium comprenant l’Onera, l’Observatoire de Paris (le LESIA et le GEPI), l’Observatoire de Grenoble, et avec la participation de la division technique de l’INSU du CNRS. L’ESO a financé la construction de NAOS et a participé à certains sous-systèmes.


Il intègre des composants optiques, mécaniques, électroniques et informatiques sophistiqués qui lui permettent d’aiguiser le regard d’un des quatre télescopes géants du VLT : ce télescope retrouve la capacité - prédite par l’optique ondulatoire - de distinguer des détails d’autant plus fins que les miroirs sont de grande taille, capacité dont l’atmosphère l’avait privé. Pour arriver à compenser les creux et les bosses que la traversée de l’atmosphère a imprimé dans l’onde lumineuse, il faut appliquer près de 600 fois par seconde des commandes à deux miroirs :
– un miroir déformable de la société CILAS comportant 185 actionneurs utiles (photo ci-contre),
– un miroir rapide deux-axes (tip-tilt) réalisé par le LESIA.
Restituée pratiquement telle qu’elle était avant son entrée dans l’atmosphère, cette onde peut alors être focalisée pour former une image quasi-parfaite sur une caméra. NAOS fournit ses images corrigées à CONICA, une caméra infrarouge construite par un consortium de laboratoires en Allemagne.

NAOS comporte également 2 analyseurs de surface d’onde, qui permettent de mesurer les perturbations introduites par l’atmosphère. L’un de ces analyseurs a été conçu et réalisé au LESIA : il fonctionne dans l’infrarouge afin de pouvoir étudier des astres de luminosité trop faible dans les longueurs d’onde visible. La photo ci-contre montre l’un des sous-systèmes de cet appareil qui fonctionne à très basse température.

Le LESIA a également eu la responsabilité de l’intégration finale et de la caractérisation de NAOS. Pour cette dernière tâche, un hall a été aménagé dans les locaux du CNRS-Bellevue afin de pouvoir travailler dans des conditions d’environnement et d’espace satisfaisantes : NAOS mesure 2m50 en diamètre et pèse près de 2 tonnes.
Les premières images avec NAOS
NAOS a été installé au cours du mois de novembre 2001 et a vu sa première lumière le 3 décembre 2001 (cf. le film ci-dessous).

Les images ci-dessus illustrent le gain remarquable apporté par l’optique adaptative NAOS en comparant la photo d’un même objet, l’amas stellaire dense NGC 3603 dans la constellation de la Carène, obtenue avec la caméra ISAAC du VLT (sans optique adaptative) et avec NAOS/CONICA. Le nombre d’étoiles détectées, en particulier les étoiles de très faible éclat, est très supérieur sur l’image obtenue avec NAOS/CONICA : cela permet une étude détaillée de la façon dont les étoiles se répartissent, depuis les faibles jusqu’aux très grandes masses, lors du processus de formation stellaire. Cette région est particulièrement intéressante de ce point de vue, car elle est le siège d’une activité de formation stellaire parmi les plus intenses de notre Galaxie.

La région de Kleinmann-Low, située autour de l’objet de Becklin-Neugebauer dans la grande nébuleuse d’Orion est une région extrêmement active du point de vue de la formation d’étoiles : elle contient en particulier un amas stellaire très jeune, encore enfoui dans le cocon de gaz et de poussière où il a vu le jour. Ce n’est que dans l’infrarouge que ces bébés-étoiles peuvent être observées. La source la plus brillante est l’objet de Becklin-Neugebauer (BN) : c’est l’un des objets les plus étudiés dans la classe des proto-étoiles, ces étoiles qui n’ont pas encore atteint le stade où les réactions de fusion nucléaire sont établies, comme dans notre Soleil. L’image de NAOS ci-contre a permis d’étudier les éjections de matière très importantes qui caractérisent la phase proto-stellaire, ainsi que la formation des étoiles de très petite masse qui apparaissent comme les sources les plus faibles sur cette image. Parmi ces sources, des "naines brunes" sont très certainement présentes. Cette image a été obtenue en utilisant l’analyseur de surface d’onde infrarouge réalisé par le LESIA à l’Observatoire de Paris. La source BN a servi de "source de référence" à l’analyseur.
La science au LESIA avec NAOS
Tous les domaines de l’astrophysique vont bénéficier de ce remarquable bond en finesse de détails procuré par NAOS. Au LESIA, Deux thématiques de recherche exploitent les impressionnantes performances de NAOS :
– l’étude des coeurs de galaxies : grâce à l’analyseur de surface d’onde infrarouge de NAOS, une équipe internationale comprenant des chercheurs du LESIA a démontré l’existence d’un trou noir supermassif au centre de notre propre galaxie et continue d’en suivre l’activité régulièrement,
– l’étude des objets du système solaire : la capacité de résolution de l’instrument est telle qu’il est possible d’observer des astéroïdes, pour en déterminer la taille et la composition de la surface, et des détails insoupçonnés sur les satellites de planètes géantes, comme Titan.