Interactions ondes/particules
Les interactions ondes/particules ont été mises en évidence pour la première fois par Stverak et al. (2008) pour les électrons du cœur de la fonction de distribution à partir de l’analyse d’environ 120 000 fonctions de distributions observées par Helios, Cluster et Ulysse. La figure ci-jointe (a) montre l’histogramme bi-dimensionnel de l’anisotropie de température du cœur (Tc⊥/Tc||) en fonction du rapport entre les pressions cinétique et magnétique du plasma (βc||). Centrées autour de l’isotropie (Tc⊥/Tc||=1) les observations montrent que les fortes anisotropies sont contrôlées par des instabilités de type Whistler pour Tc⊥/Tc||>1 et des instabilités de type Fire-hose pour Tc⊥/Tc||<1. La figure ci-jointe (b) montre qu’en plus du rôle des instabilités, les collisions coulombiennes jouent également un rôle dans l’isotropisation des électrons du cœur. Sur cette figure, les niveaux à 70% de l’histogramme précédent sont tracés pour différentes populations de vent solaire différenciés par leur âge collisionnel (rapport entre le temps de transit et l’inverse de la fréquence de collision). On peut clairement voir que plus une population de vent solaire a subi de collisions au cours de son transport et plus elle est proche de l’isotropie de température. On peut donc en conclure que les collisions Coulombiennes contrôlent le comportement du gros des distributions et que les instabilités de plasma se déclenchent pour les forts écarts à l’équilibre.

Les ondes d’Alfven et les instabilités paramétriques
Les ondes d’Alfvén sont caractérisées par une importante propriété, celle d’être des solutions exactes des équations de la magnétohydrodynamique (MHD) idéale, dans le cas linéaire (petite amplitude) et dans celui non-linéaire (grande amplitude). Même s’il s’agit de solutions stables pour la MHD incompressible (où elle peuvent donc se propager librement), en présence de fluctuations de densité, les ondes d’Alfvén peuvent interagir avec les modes compressibles du plasma. Il en résulte un amortissement, donnant lieu à ce que l’on appelle "les instabilités paramétriques".
Dans ce phénomène, une onde d’Alfvén mère interagit avec un mode sonore (acoustique ou acoustique-ionique, selon le régime considéré) qui est généré par l’instabilité et croît de façon exponentielle. Cette interaction, qui est du type 3-ondes, donne lieu aussi à un troisième mode, qui correspond à une onde d’Alfvén fille, appellé "upper" ou "lower sideband".
Dans le cadre du vent solaire, l’instabilité paramétrique qui a beaucoup été étudié, est l’instabilité de "decay" : elle donne lieu à des ondes filles qui se propagent en direction opposé à celle de l’onde mère. Ce phénomène pourrait permettre la génération de flux d’ondes tel qu’observé et contribuer au développement de la turbulence.
Récemment un code numérique "hybride", où les ions sont traités comme des particules et les électrons comme un fluide, a permis d’étudier la dynamique de l’instabilité paramètrique de type decay, l’énergie associée à la propagation des ondes et la nature de l’interaction à 3 ondes. La nouveauté est que ce code prend en compte des effets cinétiques liés à la dynamique des ions et leur résonance avec les ondes (Matteini et al., JGR, 2010). Par ailleurs, contrairement au cas MHD, un taux d’accroissement de l’instabilité est présent. Quant à la saturation de l’instabilité dans un plasma non-collisionnel, comme le vent solaire, elle est due au piégeage des particules.

Déformation de la fonction de distribution des particules autour de la résonance (droite).
Nous avons prouvé que la conséquence principale de ce piégeage, qui implique la déformation de la fonction de distribution des particules autour de la résonance avec la vitesse de phase de l’onde acoustique, est la génération d’un faisceau de protons accélérés le long du champ magnétique. Ce faiseau se propage avec une vitesse qui peut atteindre la vitesse d’Alfvén, dont la présence est une caractéristique souvent observée dans le vent solaire : ces résultats fournissent donc une possible explication pour la présence de cette population, à partir de l’instabilité paramétrique.
Afin de mieux reproduire les conditions du vent solaire, nous avons considéré des ondes d’Alfven mères ne se propageant pas strictement le long du champ magnétique (Matteini et al. GRL 2010) : la plupart des fluctuations Alfvéniques observées correspondent à des ondes en propagation oblique par rapport au champ magnétique ambiant. Les résultats montrent que, l’instabilité a toujours lieu, avec un taux de croissance qui diminue avec le cosinus de l’angle entre k et B initial.
La déformation de la fonction de distribution des protons et la formation de faisceaux ont aussi été observées, en accord avec les résultats du cas strictement parallèle.

Cette étude montre qu’il est possible d’exciter des petites échelles en direction perpendiculaire directement à partir de la propagation d’ondes d’Alfvén quasi-parallèles à plus grande échelle. Cela constitue un scenario alternatif à la turbulence dans la génération des petites échelles transverses ou au moins une première étape, qui, après à la dissipation des fluctuations, peut amener le vent solaire à avoir une cascade turbulente.
Référence
Matteini et al., Ion kinetics in the solar wind : coupling global expansion to local microphysics, Sp. Sci. Rev. 2011.